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f. 8 v°


langaje , vn peu plus ſolid’ ę fęrme .

Ęn comęnc̨ãt
donq a c̨ęlles qi ont ‹a› , ęn tę́te , nous ęn auons vn
ęn ‹ai› , ou ‹ay› ( car je ne fę́s point de differęnc̨’ ęntre
l’ ‹i› , ę ‹y› Gręc ) come ‹payant› , ‹gajant› , ‹ayãt› . Vn’
aotr’ ęn ‹ao› , come , ‹aotant› , ‹aos› , ‹loyaos› : pour la-
qęlle l’ ecritture Franc̨oęz’ abuze de la diphthõ-
ge ‹au›*1 , qe la prononc̨íac̨íon ne conoęt point .
Car com’ aotrefoęs je vous ey dit , la diphthõg’
ęt de tęlle nature q’ ęlle reqiert la prolac̨íon ęn
vne mę́me ſyllabe dę’ deu’ voyęlles qi la compo-
zet : come nou’ le fę́zons comunemęnt : ę einſi
l’ obſęrue l’ ęcritture , ęn ‹moindre› , ‹peindre› : ę’ qels
nou’ prononc̨ons lę’ diphthonges ‹oi› , ę ‹ei› , ęn vne
mę́me ſyllabe .

Ę pourtãt ſont abuzez tous
c̨eus qi ſe pęrſuadet qe deu’ voyęlles conioinctes ęn-
ſęmble , caozet vn tiers ſon , qi ne tient ne de l’ u-
ne , ne de l’ aotre : come qant vous ecriuez ‹mais› ,
pour ‹mę́s› , il dizet qe ‹a› , ę , ‹i› , conjoins ęnſęmble ,
forjet la prolac̨íõ de ‹ę› , ouuert : ſuyuãt leur ręgle
donq je direy qe ‹ayant› , aora ęn ſa prononc̨ía-
c̨íon ‹ęant› : ‹payant›2 , ‹paye›3 , pęant , pęe4 , je direy le ſẽ-
blable de toutes aotres diphthõges qe vou’ pro-
nõc̨ez com’ ęlles ſont ecrittes5 , q’ ęlles doęuet fę́r’
vn ſon tiers , aotre qe c̨eluy dę’ deu’ voyelles cõ-
iointes ęnſęmble : ę qe conſeqęmmęnt vous ecri-
uez mal ‹moĩs› , ‹eureus› , ‹eaje› ( on dit bien aoſi aje , ę
ęt la diphthonge ‹ea›6 , bięn rar’ ęn Franc̨oęs ) vu
qe vou’ prononc̨ez lę’ mę́mes voyęlles qi ſont
ecrittes , ę q’ ęlles ne forjet point la vn tiers ſon .


1Cette séquence n’est en effet pas cataloguée parmi les 16 diphtongues (11v). Meigret a proposé ‹ao› à la place.
2Deux voyelles distinctes dans /pε-jɑ̃/
3Deux voyelles distinctes dans /pε-(jə)/
4Meigret a touché le problème de comment discerner la diphtongue du digramme. Sa prosition étant nette, il faut que deux voyelles (y compris semi-voyelle ou glide) font un son individuel, « tiers » selon Meigret, qu’aucun hiatus ne sépare. L’« ayant » ne porte pas une diphtongue, car on peut entendre deux voyelles distinctes en « ę-ant » (nous insérrons le trait d’union), de même, « pę-ant » et « pę-e ». Nous ajouterons une remarque technique. A vrai dire, le moyen graphique de Meigret est insuffisant : « pęant » et « pęe » sont deux notations et non pas deux graphies proposées, mais leur présentation n’a pas pu se diffèrer des mots, « payant » et « paye ».
5Ce sont les « diphtongues » pour la plupart des gens, et non pas celles selon Meigret. Ce changement soudain de point de vue – du sien en celui du locuteur ordinaire – augemente parfois la difficulté de bien suivre le raisonnement du grammairien. Notons donc que son « je direy » déroule ce qu’il critique.
6La séquence ‹ea› de « eaje » qui sonne /a/ se conforme à la définition de diphtongue.