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f. 7 v°


m’ ils ſont ecriz : come , ‹ai› , ęn ‹paiant› , ‹gajant› , ‹es› ,
ęn ‹eſtime› , ‹c̨eleſtine› : ę qe dauantaj’ il ęn ęt d’ ao-
tres qe par mę́me rę́zon il faodroęt ecrire par ‹ai› ,
ou ‹es› : ę męmemę̃t tous auęrbes tęrminez ęn ‹ęnt› ,
ę’ qels l’ ‹ę›1 , ęt tout tęl , qe c̨eluy de ‹bę́te› , ‹tę́te› : de ſor-
te q’ il faodroęt ecrire ‹ſouuaint› pour ‹ſouuęnt› ,
‹furait› pour ‹furęt› , ‹maittre› pour ‹męttre› , d’ aoſi bõ-
ne rezon2 , qe ‹maiſtre› pour ‹mę́tre› : ę finablemęnt
‹roai› pour ‹roę› , ę ‹ſairt› pour ‹ſęrt› , aoſi bien qe vou’
fęttes ‹fait› , pour ‹fęt› .3

Ao demourant c̨e ne ſeroęt
qe repetic̨íon d’ amener lę’ rę́zõs qe peuuet met-
tr’ ęn auant c̨eus qi ſe treuuet ſcandalizez du
« trętté » qe j’ ey fęt de l’ abus4 de l’ ecritture Franc̨oę-
ze : aoqel j’ ey ſi bien ſatisfęt , qe pas vn de tous
c̨ęs malcontans , ne ſ’ ęt point ęncor jetté aos
c̨hams pour par viues ręzons ręnuęrſer lę’ mye-
nes ęn mę’ reſponſes .5 Combien q’ il ęt bien rę́-
zonable qe de qiconq’ a pec̨hé publiqemęnt , la
reprehęnſíon ſoęt publiqe : ę mę́memęnt qant
la faote touc̨he qelq’ art ou doctrine : pour l’ a-
bus qi peut ancrer ęn l’ opinion dęs homes . Si
dõqes j’ ey ſęt faote , ęll’ ęt publiqe : la reprehęn-
ſion donq deura ętre de mę́me par uiues rę́zõs ,
ę non pas ſous la c̨heminé’ ęn Francarc̨hier _
de Baη̃olęt par injures6 : attęndu qe toutes c̨ho-
zes q’ on veut corrõpre , ne le peuuet ętre qe par
leur’ contrę́res . E pourtant toute doctrine ſoęt
faoſ’ ou vraye , doęt ętre combattúe par contrę́-
re doctrine : car la cõſeqęnc̨e n’ ęt pas bone , tout


1‹ę› ouvert, selon le contexte
2Il s’agit d’un sarcasme.
3Comprenons bien ce raisonnement par l’absurde : si on continuait indifféramment l’usage de ‹ai›, il faudrait alors écrire ‹ſouuaint› pour ‹ſouuęnt› ... ‹fait› pour ‹fęt›. La graphie avant « pour » n’est pas vraiment conseilée, mais démontre l’abus que le segment ‹ai› usurpe le son de « ę ouvert » (supposons /ɛ/).
4Lisons mieux « certains » abus, car il serait imprudent de suggérer l’équivalence entre le « traité de l’usage commun de l’écriture » (1542, 1545) au « traité de l’abus de l’écriture » d’ici. Le champ de « l’usage » est plutôt neutre pour Meigret, et surtout fondamental à son épistémologie empiriste.
5Compte tenu de ces « réponses », et vu le long paragraphe justificatif qui s’en suit, on peut déduire que cette Grammaire n’est mise sous presse qu’après la Défense contre Glaumalis du Vezelet (Gaullaume des Autels), et la Réponse à Peletier du Mans. Notons que ce paragraphe est plutôt une digression dans ce Livre 1 (que dans la préface).
6Le progrès de la science (souvent dite doctrine) est tenu pour un bien commun, pour lequel toute discussion publique est bénéfique. L’accent mis sur l’attribut « public » (rationalité, honnêteté, bien commun) semble refléter la calomnie pseudonyme (Glaomalis de Vezelet, transformé en Guillaume des Autels) et l’insulte ou « injure » (nom de Meigret et « maigres fantaisies », associé par Théodore de Bèze dans Abraham Sacrifiant, 1550). cf. Colard 1999, Montagne 2014 ...