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f. 2 v°


ne de la coulpe d’ aotruy ) dõt ęlle ne puyſſe tręt-
ter amplemęnt , ę elegammęnt . Parqoę _ il nou’
faot cõfęſſer q’ ęll’ a ęn ſoę qelq’ ordre , par le qel
nou’ pouuons diſtinger lę’ partíes dont ſont cõ-
pozez tou’ langajes , ę la reduir’ a qelqes regles .


Mę́s come le deuoęr d’ vne grammęre jiz’ ęn la
rec̨hęrc̨he de la doctrine , ſeulemęnt de bięn ,
ę propremęnt parler1 , mę́s aoſi de bien ecrire2 ,
pour la nec̨eſsité qe nous auons de l’ ecritture ,
tant pour la debilité de la memoęre , qe pour
ſupplíer vne prezęnc̨’ ęn l’ abſęnce dę’ pęrſones3 ,
on a de coutum’ ęn toutes langes de lęs expe-
díer ęnſęmble . Tęllemęnt qe come lęs anc̨iens
vſſet inuęnté propre characther’ ou lęttre4 tant
a la voyęlle , q’ a la conſonante , pour lęs aſſęm-
bler ęn l’ ecritture ſelon qe de c̨hacune parolle
le batimęnt dę’ voęs le reqęrroęt , c̨eus qi ont
voulu bien dreſſer vne grãmę́re ſur le bon vzaje
de parler , ont aoſi ęn le ſuyuant5 doné lę’ moyẽs
de bien ecrire par lę’ lęttres , ęn gardant a c̨ha-
cune ſa puiſſanc̨e .

Or ęt il q’ ao jourdhuy lę’ Frã-
c̨oęs ont tant etranjé l’ ecrittur’ ęn vne gran’ par-
tíe de vocables , de l’ uzaje de parler : tant par vne
ſuperfluité de lęttres , qe par la cõfuziõ6 de leur
puyſſanc̨e ( com’ aotrefoęs je vous l’ ey aſſes mon-7
tré ) q’ il n’ ęt poſsible de dreſſęr ſur ęlle , aocune
fac̨on de grammęre qe c̨e ne fút a notre confu-
zion8 . Car qi ſera l’ hom’ ao monde qi ne m’ ęſti-


1Domaine de la rhétorique
2Domaine de la grammatologie
3Ou les objets en position sujet. Dans les discussions métalinguistiques durant la Renaissance et l’âge classique, le concept de « personne » est élargi et employé afin de dénoter l’agent (par opposition au patient), tout en gardant un lien intime avec la positio, « imposition / dénominaiton / référence », en grammaire latine (voir Priscien).
4Meigret fait référence à ces caractère ou lettre, quand il parle de « moyens » (graphiques) dans cette Grammaire. .
5La représentation graphique des langages pour Meigret est primordiale, puisque l’étude des langages sous forme orale en dépend directement.
6une autre manière de dire l’« usurpation »
7Le traité de l’écriture (1542/45), et la préface au Menteur (1548)
8La grammatologie (science de l’écriture, en termes de Ignace Gelb, 1952) est en effet fondamentale à la grammatisation (mise en œuvre d’une grammaire, selon Sylvain Auroux, 1994).